En 1954, Samuel Z. Arkoff et James H. Nicholson fondent la société de production American Releasing Corporation (transformée deux ans plus
tard en American International Pictures), qui fera les beaux jours des drive-in.
Les deux associés ont compris que les adolescents représentent
un important public et produisent à leur intention toutes sortes de séries
B dans des genres précis : films de voitures (The Fast and
the Furious), science-fiction (Day the world ended),
horreur (The Beast with a Million Eyes), etc. De son côté,
le jeune producteur-scénariste Herman Cohen
est à la recherche d'un projet de film original. Il voyage durant dix
semaines à travers le pays, rencontrant les exploitants de salles et
fréquentant les drive-in, pour arriver à ce constat : "62%
du public de cinéma avait entre quinze et trente ans, et les plus gros
succès étaient les films d'horreur et les films de rock'n roll.
J'ai donc décidé de combiner les deux genres."
En 1957, Cohen propose aux dirigeants de AIP l'idée de Teenage Werewolf :
un lycéen souffrant d'excès de violence se fait soigner par un
médecin, qui veut fait revenir l'être humain à ses origines
animales. Il injecte au jeune garçon une solution qui va le transformer
en loup-garou. Un adolescent est bientôt retrouvé mort dans les
bois et une fille est agressée par la bête dans le gymnase du lycéeâ¦
Michael Landon est alors un jeune
acteur qui a du mal à joindre les deux bouts. Marié et père
d'un enfant, il court le cachet à la télévision mais n'a
pas encore réussi à percer. Il passe une audition pour le rôle,
en compétition avec Scott Marlowe
et il est choisi par Herman Cohen, qui lui signe
un contrat pour plusieurs films. Landon est ravi,
il va pouvoir renflouer ses caisses et espère que sa carrière
va enfin être lancée.
Le film se tourne pour moins de 150 000 dollars en huit jours aux studios
Goldwyn et à Griffith Park. Les maquillages sont dus à Philip
Scheer qui avait travaillé à l'Universal sur les films du Loup-Garou
et de Frankenstein. "C'est drôle, raconte Cohen,
quand il avait ce maquillage sur le visage, Michael disait qu'il se sentait
comme un loup-garou. Il était excellent. Il n'y a rien qu'il ne faisait
pas que nous voulions qu'il fasse ; en fait, il en faisait toujours plus."
Au point, un jour, de faire une chute (dans la scène où il terrorise
une jeune fille dans le gymnase du lycée), qui aurait pu lui être
fataleâ¦
James H. Nicholson modifie le titre en I Was a Teenage Werewolf
(littéralement, "J'étais un adolescent loup-garou") et
organise une importante campagne de publicité. Le titre fait sensation
et est tourné en dérision par les comiques Bob
Hope ou Jack Benny. Les magazines "Time"
et "Look" demandent à parler au producteur de ce film qui semble
sortir du lot. Herman Cohen, dont l'entourage avait
conseillé de prendre un pseudonyme pour que ce film d'horreur pour ados
ne nuise pas à sa carrière (!), garde finalement son nom au générique
et, même, revendique sa position de producteur.
I Was a Teenage Werewolf rapporte deux millions de dollars et dans les
semaines qui suivent, Herman Cohen écrit et
produit I Was a Teenage Frankenstein. Michael
Landon n'a jamais renié ce film qui l'a consacré vedette
(il obtiendra deux ans plus un des rôles principaux de la série
Bonanza), et lui a même rendu hommage en 1987 dans
un épisode des Routes du paradis, où il reprenait son maquillage
velu ("I was a middle aged werewolf", "J'étais
un drôle de loup-garou" en français).
Le film a été exploité sous le titre Le Loup-garou en France, et Les Griffes du loup-garou en Belgique.
Philippe Lombard